DEMANDES POUR LE RESPECT DES DÉFENSEURS DE DROITS HUMAINS FACE AUX POLITIQUES NÉO-LIBÉRALES POST-CONFLIT ET L’ACCÉLÉRATION DE L’EXPANSION MINIÈRE
13 avril 2013

EXPLOITATION MINIÈRE CANADIENNE AU GUATEMALA ET CRIMINALISATION DES DÉFENSEURS DE DROITS HUMAINS
POLITIQUES NÉO-LIBÉRALES POST-CONFLIT ET ACCÉLÉRATION DE L’EXPANSION MINIÈRE
La fin du conflit interne au Guatemala et la signature des Accords de paix en 1996 ont été suivi par une prolifération de politiques néo-libérales, une diminution du rôle de l’État et une croissance des investissements étrangers pour des projets de grandes envergures.
L’augmentation des prix des métaux – principalement de l’or – a été accompagné de l’octroi de plusieurs concessions à des compagnies minières pour l’exploration et l’exploitation. Entre 2005 et février 2013, le nombre de concessions a augmenté de 111 à 379. De plus, 656 sont en attente d’approbation, dont 385 pour l’exploitation minière de métal. La majorité de ces concessions sont pour des compagnies canadiennes.
La production de minière de métal est assez récente au Guatemala, et est en augmentation exponentielle : de 69 M Quetzales (9 M $) en 2004 à 7 110 MQ (936 M $) en 2011.
Avec l’entrée au pouvoir du nouveau président et ex-militaire, le général Otto Perez Molina, cette tendance risque de s’accroître d’avantage. Le président précédent, Alvaro Colom, avait déclaré un moratoire sur l’octroi de nouveau permis à cause de la conflictivité autour des sites miniers.

Imposition de projets miniers et absence de consultation
En voyant l’expansion rapide de l’industrie minière et leur exclusion dans le processus de décision, les communautés autochtones ont organisées des consultations publiques. Ces référendum, généralement organisés par les autorités municipales et se basant sur le Code municipal et la Convention 169 de l’Organisation international du travail (OIT), ont soulevés des controverses légales, mais le gouvernement guatémaltèque refuse d’écouter la voix de ces populations.

À ce jour, plus de 60 consultations populaires sur l’extraction minière ont eu lieu, au cours desquelles plus d’UN MILLION de personnes, principalement des Mayas, y ont participé.
Sur une autre note, le Conseil des peuples de l’occident a présenté une cause à la Cour constitutionnelle du Guatemala pour l’inconstitutionnalité de la loi minière de 1997. Cette loi est entrée en vigueur sans consultation préalable sur les impacts sur les peuples autochtones. De ce fait, cela va à l’encontre de la Convention 169 de l’OIT qui a été ratifié par le Guatemala en 1996 et incluse dans la constitution du pays.
Présentement, cinq projets de quatre compagnies canadiennes sont à la source de conflits au Guatemala, créant un climat de conflictivité sociale, violations de droits humains, actes de violence et d’intimidation, meurtres, arrestations massives illégales, judiciarisation des manifestants, et impacts négatifs sur l’environnement (pollution et contamination des sources d’eau), etc. Les licences d’exploration et d’exploitation ont été octroyées sans consultation préalable des communautés affectées et en ignorant les résultats des consultations locales.

Criminalisation, répression et remilitarisation
La tendance sous le nouveau gouvernement d’Otto Perez Molina est d’utiliser les forces policières et militaires pour réprimer les manifestations de mécontentement près des sites miniers ou d’autres projets d’exploitation des ressources naturelles. Prenons par exemple les événements récents en 2012 avec l’état de siège à Barillas (une ville de la municipalité du même nom) où des dirigeants communautaires ont été détenus arbitrairement, de même que la répression violente de l’armée contre la population de Totonicapan. Les tactiques de criminalisation sont aussi utilisées par les compagnies minières contre la population autochtone opposée à leurs activités minières.

Accès à la justice et recours
Les victimes de violations de droits humains au Guatemala n’ont pas accès à la justice dans leur pays qui est décrit par les Nations-Unies comme un « des pays les plus violents officiellement en paix » où selon Human Rights Watch, 99.75% des crimes violents restent impunis à cause de la corruption, l’intimidation et les attaques contre les juges et les victimes.
De plus, les victimes trouvent rarement justice au Canada où les procès sont très couteux et épuisants et où la cour utilise souvent le forum non conveniens pour refuser d’entendre une cause (considérant qu’il y a un forum plus approprié disponible aux parties). Il y a présentement trois causes déposées en cour civile au Canada par des autochtones guatémaltèques contre la compagnie minière canadienne Hudbay pour le présumé assassinat et viol de villageois par les forces de sécurités engagées par sa filiale au Guatemala. La décision n’a pas encore été prise a savoir si la cour acceptera de recevoir cette cause.

Laissez-faire corporatif vs responsabilité sociale des entreprises
Au Canada, il n’y a aucune obligation pour les compagnies minières opérant à l’étranger de respecter les normes internationales sur les droits humains et l’environnement. Au cours des quatre dernières années, le gouvernement canadien a annoncé une série d’initiatives faisant la promotion d’un laissez-faire corporatif et des mesures volontaires au détriment d’une reddition de compte des entreprises. Le financement de l’Agence canadienne de développement international (ACDI) à des pays hôtes pour des projets de renforcement des capacités, de même que le partenariat entre compagnies minières et ONG soulèvent plusieurs préoccupations de la part de la société civile au Guatemala et au Canada. Car ces projets font abstraction de la source du problème et de l’obligation de l’État de consulter les populations autochtones affectées par les projets extractifs et les conventions à ce sujet.

ACTIONS POSSIBLES
Demander :
Au gouvernement canadien :
• Reconnaître la conflictivité entourant les projets miniers au Guatemala et appuyer l’approche fondée sur les droits pour le développement.
• D’arrêter d’utiliser l’aide au développement comme un véhicule pour étendre les intérêts des compagnies minières canadiennes à l’étranger, y compris par le biais d’appuis financiers aux institutions académiques qui font la promotion de l’expansion de l’industrie minière dans les pays en développement.

Aux députés fédéraux canadiens :
Presser le gouvernement canadien de changer son approche au sujet de l’industrie extractive de mesures volontaires à des mesures obligatoires et de légiférer afin d’inclure les points suivants :
• Favoriser les droits humains dans le contexte de l’exploitation des ressources naturelles au Guatemala;
• Implémenter des mesures pour suspendre l’aide et les services gouvernementaux aux compagnies qui ne respectent pas les standards de reddition de comptes juridiquement contraignantes au Canada basés sur les normes internationales de droits humains et qui garantissent un développement durable soucieux de l’environnement;
• Garantir un meilleur accès à la justice aux résidents non-canadiens affectés par les activités de canadiens et de compagnies minières canadiennes à l’étranger;
• La création d’un bureau d’Ombudsman indépendant pour recevoir les plaintes et vérifier la conformité avec les standards ci-haut mentionnés.

Au gouvernement guatémaltèque :
• Respecter son obligation de faire appliquer la Convention 169 de l’Organisation internationale du travail, un instrument international juridiquement contraignant qui oblige l’État à consulter les populations autochtones sur des sujets qui les affectent et de reconnaître leur droit à décider des priorités pour le développement.
• De protéger les défenseurs de droits humains et d’enquêter sur les attaques contre eux, et de prévenir les arrestations arbitraires.

Aux compagnies minières canadiennes opérant au Guatemala :
• Réaliser une enquête préalable afin de ne pas violer les droits des populations affectées et prévenir les impacts négatifs pour eux, dont la conflictivité.

Au public canadien :
• De lire et de s’informer au sujet des impacts de l’industrie minière.
• D’être solidaire avec les communautés guatémaltèques défendant leur territoire.
• D’appuyer le travail et les actions urgentes des ONG dénonçant les violations de droits humains au Guatemala.
• De porter un regard critique sur ses placements et investissements personnels (se renseigner et questionner son institution financière au sujet des compagnies dans lesquels vous avez des placements).
• D’être soucieux de l’environnement et agir de façon socialement responsable.

 

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